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Les assassins médiévaux : une légende noire entre complots et drogues

le par - modifié le 27/09/2022
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La communauté chiite des nizârites et son chimérique chef le Vieux de la Montagne ont longtemps fait fantasmer l’Occident, avide de mythes dépeignant un Orient volontiers « barbare ». Au point d’être à l’origine du mythe autour d’un improbable complot maçonnique.

Les nizârites, branche de l’islam chiite ismaélien fondée à la fin du XIe siècle en Perse aux alentours de la forteresse d’Alamut, a donné lieu, dès le Moyen âge, à une série de légendes noires développées tant par leurs adversaires musulmans sunnites que par des auteurs chrétiens.

Beaucoup ont décrit ce groupe, adepte, il est vrai, de l’assassinat ciblé, comme une secte dirigée par un être mystérieux, le « Vieux de la Montagne ». Marco Polo affirme par exemple dans Le Devisement du monde (v. 1299) que celui-ci use notamment d’un breuvage narcotique et d’un jardin clôt qu’il présenterait comme une préfiguration du paradis pour fanatiser ses fidèles et les envoyer dans des missions suicides.

Au début du XIIIe siècle, Bernard le trésorier, s’inspirant peut-être d’un passage du Roman d’Alexandre (IIIe siècle de notre ère), affirme de son côté que le « Vieux de la montagne » aurait amené un seigneur franc dans sa forteresse où « était une haute tour, et sur chaque créneau étaient deux hommes vêtus tout de blanc […] Le sire des Hassissins cria, et deux des hommes qui étaient sur la tour se laissèrent aller en bas et se brisèrent le cou. »

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Une telle légende noire fait que, très rapidement en Occident, nombre d’auteurs comparent leurs adversaires à ce groupe pour mieux les disqualifier. Le terme arabe péjoratif hashishi ((littéralement « bas peuple ») utilisé pour décrire les nizârites donne à partir du XVIe siècle en français le mot « assassin ». À cette même époque, comme d’autres protestants, Agrippa d’Aubigné dans sa Confession catholique du sieur de Sancy (v. 1597) fait par exemple le lien entre les Jésuites et la secte du Vieux de la Montagne.

Près d’un siècle et demi plus tard, des penseurs, comme Diderot, mais aussi des jansénistes, reprennent à leur compte cette accusation dans le contexte d’une vaste campagne pour l’interdiction de la compagnie de Jésus, qui aboutit en 1773. Ainsi, si Voltaire, dans son Dictionnaire philosophique (1764), ne fait pas spécifiquement le parallèle avec l’ordre lorsqu’il évoque les assassins, la même année, Jean Antoine Gazaignes, proche des milieux jansénistes, le fait lui ouvertement dans ses Annales de la société des soi-disants jésuites :

« France, étois-tu donc destinée à reproduire & à nourrir dans ton sein une nouvelle secte d’Assassiniens [sic], tels que ces monstres que commandoit dans le XIIe siècle le Vieux de la Montagne […].

Réfléchis sur les dogmes homicides que pratiquoit la Bande Assassine du Vieux de la Montagne, & compare-les avec les règles, les principes & l’enseignement de ceux qu’on te donne pour tes Docteurs, tes Maîtres & tes Conducteurs dans les voies du salut.

L’Analogie en est si frappante que les maximes de ceux-ci semblent être calquées sur la Doctrine de ceux-là. »

Cette idée perdure tout au long du XIXe siècle. On la retrouve sous la Restauration, après la refondation en 1814 de la compagnie de Jésus. Dans Le Constitutionnel, 25 août 1826, alors premier quotidien de France et affichant son penchant libéral, un article affirme que le général des jésuites ne peut être comparé « qu’au vieux de la montagne, et plus dangereux peut-être, parce que ses Séides sont plus nombreux, revêtent tous les habits, et se cachent sous toutes les formes ».

On retrouve cette idée jusqu’au XXe siècle, par exemple dans l’Encyclopédie anarchiste (1925-1934) dirigée par Sébastien Faure, où l’on peut lire dans l’entrée « Jésuites », rédigée par André Lorulot :

« On a prétendu qu’[Ignace de Loyola] s’était inspiré d’une secte musulmane, les Haschischins (dont on a fait les Assassins), qui prenaient du haschisch, pour se mettre dans un état spécial. Loyola remplaça le haschisch par le mysticisme poussé jusqu’à l’exaltation et les résultats furent identiques. »

Les membres de la compagnie de Jésus ne sont pas les uniques cibles de ce type de rapprochement. En effet, dès 1791, ce sont les jacobins qui sont le plus régulièrement associés aux séides du « vieux de la montagne ». Le Journal général de l’Abbé Fontenai du 10 juillet 1791 explique ainsi :

« On frémit encore aujourd’hui en lisant l’histoire de ce prince des assassins, de ce Vieux de la Montagne qui, dans le XIIIe siècle, avoit sous ses ordres une foule de jeunes gens disposés à […] assassiner les Princes, les Généraux d’armée qu’il lui plaisoit d’immoler […]

Etoit-il donc réservé au XVIIIe siècle, au siècle de cette prétendue philosophie qui devoit rappeler l’ordre & la justice sur la terre, de faire revivre des maximes que les siècles les plus barbares osent à peine avouer ? »

Très vite, les figures les plus radicales de la Révolution sont comparées au chef de l’ordre des assassins, comme c’est le cas pour Marat, « l’ami du peuple », dans Le Contre-poison du 16 mars 1791 :

« Il espère sans doute, ce perfide Ami du peuple, que si le colosse de l’Assemblée nationale venoit à être renversé, lui seul régneoit sur ses débris, & que, du haut de ce trône composé de ruines, il pourroit, comme le vieux de la Montagne, envoyer de tous les côtés une troupe d’assassins, pour servir sa rage, & exécuter ses ordres sanguinaires. »

Évidemment, le fait que, dans la Convention, les partisans d’une Révolution à outrance soient peu à peu qualifiés de « Montagnards » favorise cette métaphore qui permet de comparer les jacobins à un culte sanguinaire et fanatique, bien éloigné de leurs prétentions républicaines.

Très vite, les auteurs contre-révolutionnaires ne se contentent pas d’une simple analogie. Afin de voir la Révolution comme le fruit d’une conjuration ancienne, qui plus est née dans les méandres d’un Orient souvent regardé avec un air de soupçon, certains n’hésitent pas à affirmer que les jacobins et les francs-maçons seraient des descendants directs non seulement des templiers, comme nous l’avons vu dans un précédent article, mais aussi des assassins du Moyen âge, période perçue comme « barbare ».

Les premiers textes diffusant cette idée d’un complot maçonnique, comme Le tombeau de Jacques Molai ou Histoire secrète et abrégée des initiés, anciens et modernes, de Charles-Louis Cadet de Gassicourt paru en 1796, évoque ainsi sur plusieurs pages les liens unissant les templiers et les maçons aux assassins. Même chose pour le livre du jésuite Agustin Barruel, Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme, publié un an plus tard, dans lequel l’auteur prophétise qu’un jour :

« Le Vieux de la Montagne, le dernier Spartacus, pourra sortir lui-même de son sanctuaire ténébreux […].

Il n’existera plus empire, ni loi ; l’anathème prononcé sur les nations […] aura réduit en cendres nos autels, nos palais & nos villes. »

En plus de développer une rhétorique apocalyptique propre à terrifier ses lecteurs, comparer les jacobins aux assassins permet ce membre de la compagnie de Jésus de rejeter sur ses adversaires une image négative longtemps accolée à son ordre. André Loriot, franc-maçon, ne fera que lui rendre la pareille un siècle et demi plus tard.

La manœuvre réussit, d’autant que l’ouvrage de Barruel devient vite un texte fondateur du complotisme moderne. Désormais pour les auteurs réactionnaires, comparer les républicains et les francs-maçons aux troupes du « vieux de la montagne » est un moyen simple de les disqualifier. Alors que les monarchies restaurées après le Congrès de Vienne craignent des soulèvements républicains, Joseph von Hammer-Purgstall, auteur autrichien qui, avec son Histoire de l’ordre des assassins (1818) vite traduit dans de nombreuses langues, popularise encore plus l’idée qu’il existerait une filiation entre les révolutionnaires et les nizârites.

À un lectorat conservateur craignant que l’Europe des souverains restaurée soit de nouveau secouée par un élan républicain, il explique ainsi :

« Après la chute d’Alamout, [les assassins] tachèrent de conserver, sinon une puissance politique, du moins une influence cachée.

La constitution de la loge du Caire, la série graduée des initiations, les dénominations de maîtres, de compagnons, d’apprentis, la doctrine publique et la doctrine secrète, le serment d’obéissance passive, nous retrouvons tout cela dans ce que nous avons vu, lu ou entendu de nos jours, sur les sociétés secrètes qui ont été les instrumens [sic] de tant de révolutions, et si nous cherchons des comparaisons dans l’histoire moderne, nous verrons que la procédure des tribunaux secrets de plusieurs ordres d’Allemagne offrait aussi quelque ressemblance avec celle de l’Ordre des Assassins. »

On le voit ici, l’auteur emploi à dessein pour décrire l’ordre des assassins d’un vocabulaire (« loge », « maîtres », « compagnons », « apprentis », « initiations ») rappelant fortement celui des instances maçonniques afin d’entretenir la confusion entre ces deux mouvements qui n’ont rien à voir, tout comme l’idée même d’un « ordre » d’assassins, permettant le rapprochement avec « l’ordre du Temple ».

On retrouve un propos similaire à la fin du XIXe siècle. Léo Taxil, grand promoteur de la thèse du complot maçon, publie notamment en 1886 Les Mystères de la Franc-Maçonnerie, ouvrage illustré où les assassins, comme les templiers, sont qualifiés de « précurseurs de la Franc-maçonnerie ». L’une des images dépeint d’ailleurs l’anecdote rapportée par Bernard le trésorier, avec une variante encore plus sensationnaliste :

« Le vieux de la Montagne ordonne à l’un de ses fédavi de se plonger un poignard dans le cœur, et à un autre de se précipiter du haut de la tour. À peine Hassan eut-il parlé, qu’il fut obéi par les deux fanatiques. »

Illustration extraite des Mystères de la franc-maçonnerie de Léo Taxil, 1886 – source : WikiCommons
Illustration extraite des Mystères de la franc-maçonnerie de Léo Taxil, 1886 – source : WikiCommons

Au fil des XIXe et XXe siècles, en fonction des circonstances, on associe d’autres groupes aux assassins. Paul de Saint-Victor, auteur ouvertement versaillais, rapproche d’eux les communards dans son ouvrage Barbares et bandits : La Prusse et la Commune (1872), où il écrit :

« La bouteille fut un des “instruments de règne” de la Commune. Elle abrutissait avec le vin et l’eau-de-vie les bandes imbéciles qu’elle expédiait à la mort, comme le Vieux de la Montagne hallucinait ses séides avec le haschich.

Ses bataillons marchaient en titubant au combat. Il y avait des delirium tremens dans la folie de leur résistance. Ils tombaient ivres morts sous les balles et sous les obus. »

Dans un même ordre d’idée, La Croix du 1er décembre 1882 n’hésite ainsi pas à affirmer que Marx et Bakounine « sont les ancêtres directs des jeunes irréconciliables dont la cynique audace a épouvanté l’Europe et des forcenés qui, en plein dix-neuvième siècle, ont renouvelé les sanglants exploits des assassins du Vieux de la Montagne ».

Mais, comme pour les Templiers, ce sont surtout les pamphlétaires antisémites qui s’emparent du complot des assassins, en le liant non seulement aux franc-maçons, mais aussi aux Juifs. Edouard Drumont dans La Libre Parole du 15 juillet 1892 écrit ainsi :

« Après le Déicide […], le Juif revint à son type premier. […] Il se forma une secte qu’on croit être celle des Kabbalistes ou des Kassadim, et qui offre une grande analogie avec les Assassins du Vieux de la Montagne […].

L’Orient a produit, produit encore, produira toujours de ces associations étranges, dont tous les membres sont unis par des liens mystérieux, garantis, contre toute indiscrétion par l’inviolable secret que les initiés se jurent entre eux, protégés par la gravité même des complicités qu’ils portent, en commun.

Tout un côté du Moyen Age est là. »

L’Orient, le Moyen Âge, les assassins : tous les ingrédients sont là pour associer les Juifs à des temps et des lieux sombres, arriérés, obscurs, que Drumont oppose à l’Occident qui, lui, incarnerait le progrès et la pureté.

Poussée pour des motifs politiques, la légende noire des assassins à la fin du XIXe siècle est nettement installée dans le paysage culturel. On l’évoque immanquablement au milieu d’autres complots souvent tout aussi fantasmés. Mais les assassins possèdent une caractéristique qui les distingue bien du reste des « sociétés secrètes » : leur association avec le haschich. Celle-ci, extrapolé à partir du texte de Marco Polo (où il n’est question que de breuvage) est en réalité une invention de l’orientaliste français Sylvestre de Sacy, qui, dans un mémoire publié dans Le Moniteur universel du 29 juillet 1809, explique à propos de « cette peuplade barbare […] connue sous le nom d’Assassins » :

« Cette dénomination n’ait été donnée aux Ismaéliens à cause de l’usage qu’ils faisaient d’une liqueur ou d’une préparation enivrante, connue encore dans tout l’Orient sous le nom de haschisch. […]

L’ivresse produite par le haschisch jette dans une sorte d’extase pareille à celle que les Orientaux se procurent par l’usage de l’opium, et d’après le témoignage d’un grand nombre de voyageurs, on peut assurer que les hommes tombés dans cet état de délire s’imaginent jouir des objets ordinaires de leurs vœux. […]

Quelques-uns même dans cet état de démence passagère, perdant la conscience de leur faiblesse, se livrent à des actions brutales, capables de troubler l’ordre public. On n’a point oublié que, lors du séjour de l’armée française en Égypte, le général en chef fut obligé de défendre sévèrement la vente et l’usage de ces substances pernicieuses, dont l’habitude a fait un besoin impérieux pour les habitans [sic] de l’Égypte, et surtout pour les classes inférieures du peuple.

Ceux qui se livrent à cet usage sont encore appelés aujourd’hui Haschischin et Haschaschin. »

Cette longue citation montre bien que la peur de l’assassin se double d’une angoisse nouvelle associée à un produit rencontré lors de la première expérience coloniale française dans le monde arabo-musulman.

L’expédition d’Égypte de Bonaparte est en effet la première occasion pour de nombreux soldats français d’être régulièrement en contact avec le cannabis récréatif. Désormais, le Levant devient territoire redoutable, rempli de fanatiques religieux médiévalisés (les « barbares ») et de despotes (alors que l’Europe, elle, serait éclairée), mais aussi de substances dangereuses propres à amollir les hommes occidentaux, à quelque part, les « orientaliser ». Un des lieux communs de l’orientalisme est né.

Il connaît un succès important au fil du XIXe siècle, mais encore plus au XXe siècle, notamment durant l’Entre-deux-guerres, où une grande campagne contre le cannabis est lancée aux États-Unis par des personnalités comme Harry J. Anslinger, premier directeur du Federal Bureau of Narcotics, agence de lutte contre la drogue fondée en 1930. Alors qu’outre-Atlantique le combat contre les stupéfiants est l’occasion d’attaques racistes notamment contre les Africains-Américains ou les immigrants latinos (d’où l’adoption du nom « marijuana » pour désigner le cannabis), il favorise en France une peur grandissante des Arabo-musulmans en leur associant tous les stéréotypes orientalistes : la paresse, l’absence de contrôle, le fanatisme.

On use aussi pour cela de l’exemple des assassins, comme on peut le voir dans un article du Petit Parisien du 31 juillet 1939. Consacré d’abord à la lutte contre le trafic de drogue en Amérique, « surtout la “marijuana” » qui serait l’une des « grandes pourvoyeuses de l’armée du crime », rappelant que « l’intoxication mène au crime », celui finit immanquablement par affirmer :

« Les prêtres égyptiens en faisaient usage.

Il est reconnu, d’ailleurs, que le mot assassin a pour origine ce vocable ; il servait à désigner une secte de guerrier fondée vars l’an 1000 en Perse, dont on exacerbait la férocité par l’usage du haschich et qui servaient de gardes du corps au souverain. »

Même chose dans un article du Petit Marseillais du 4 novembre 1938 consacrée cette fois au trafic de cannabis dans le canal de Suez. Affirmant que « L’Amérique est conquise à moitié. L’Europe est menacée », son auteur n’oublie pas de rappeler que le produit était utilisé par « Le Vieux de la Montagne » :

Cette idée perdure après-guerre, notamment à la fin des années 1960 où l’on tente d’associer le mouvement de mai 1968 à l’attrait des jeunes pour l’Orient et aux drogues. Durant des débats sur les stupéfiants à l’Assemblée nationale le vendredi 24 octobre 1969, le député de gauche Alain Benoist affirme que « le problème de la drogue […] a connu une recrudescence indiscutable depuis les événements de 1968, depuis l’introduction dans notre pays d’éléments étrangers qui ont apporté avec eux une philosophie et en même temps de la drogue ».

René Chazelle, son collègue du même bord politique, renchérit :

« Non seulement le jeune drogué se détruit lui-même, mais il devient un danger social. Le mot assassin, d’ailleurs, ne découle-t-il pas phonétiquement du mot qui désigne la secte des fumeurs de haschisch ?

La filiation entre la drogue et le crime n’est pas seulement une assonance, elle est une réalité.  »

Une telle filiation ne peut qu’inciter à une forte répression, que l’Assemblée nationale finit par voter avec la très sécuritaire loi du 31 décembre 1970.

Quelques décennies plus tard, la vision déformée des nizârites sert désormais de clef d’explication à un autre phénomène contemporain : le terrorisme islamiste. En novembre 2001, le journaliste André Clavel écrit une critique du roman Alamut (1938) de l’auteur slovène Vladimir Bartol dans les pages de L’Express sous le titre « Ben Laden mode d’emploi », où il explique qu’il faut lire cet ouvrage « pour avoir une description quasi clinique de ce qui se trame du côté des montagnes afghanes et des fiefs islamistes ». Deux mois après le 11 septembre, qu’importe à l’auteur de ces lignes de tenter de comprendre qu’à travers son récit, Bartol cherchait surtout à critiquer la montée du fascisme.

Quinze ans plus tard, une semaine après les attentats meurtriers contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, l’écrivain turc Nedim Gürsel, dans les pages de L’Humanité cette fois, affirme de son côté :

« Faut-il rappeler que le mot “assassin” est d’origine arabe et vient de “hachchâchî”, mangeurs d’opium qui tuaient au nom d’une doctrine religieuse : celle d’un islam hostile à toute forme de légalisme et d’institutionnalisme.

Leur chef, Hassan Al Sabbah dit le Vieux de la montagne, les guidait à partir de l’imprenable forteresse d’Alamut où il s’était retiré. Avec l’islamisme radical et son cortège d’assassinats devenus presque quotidiens, on dirait que nous assistons aujourd’hui au retour des terroristes d’un autre âge, celui des hachchâchî de la forteresse d’Alamut. »

La légende noire accolée aux nizârites a encore, semble-t-il, de beaux jours devant elle.  

Pour en savoir plus :

Farhad Daftary, Légendes des Assassins : mythes sur les Ismaéliens, Paris, J. Vrin, 2007

David A. Guba Jr., Empire of Illusion: The Rise and Fall of Hashish in Nineteenth-Century France, Thèse de Doctorat, Temple University, 2018

David A. Guba Jr., « La légalisation du cannabis doit aussi prendre en compte son histoire coloniale », in : The Conversation, 25 août 201

Laura Minervini, « L’invention des Assassins. Genèse d’une légende médiévale », conférence à l’Ecole des Chartes, 9 novembre 2016

William Blanc est historien, spécialiste du Moyen Âge et de ses réutilisations politiques. Il est notamment l'auteur de Le Roi Arthur, un mythe contemporain (2016), et de Super-héros, une histoire politique (2018), ouvrages publiés aux éditions Libertalia.