Extrait du journal

tabacs. Première surprise, ce budget dés ta bacs, on ne le trouve nulle part. Le dernier compte général publié sur ce sujet remonta à 1913. Depuis dix ans, par mesure d'éco nomie sans doute, le monopole 11e rend plus de comptes. Les quelques renseignements dont on dispose sont errants dans le budget du ministère des finances, sous des rubriques générales, de manière qu'on ne puisse pas y regarder de près. Où il n'y a rien, la criti que perd ses droits. Mais, même quand l'ad ministration publiait un de ces gros volumes dont elle a lé secret, bourrés de chiffres inu tiles et muets sur les points essentiels, cet énorme bilan n'avait rien de commercial. On y apprenait que l'habitant du Var consom mait par tête 18 fr. 31 en 1913 au'lieu de 3 fr. 95 en 1830. Ce précieux renseignement a une valeur sociologique que nous n'avons garde de méconnaître, mais nous aurions aimé savoir quelle était la valeur des bâti ments et du matériel, quelle somme était pré vue pour la rémunération du capital ainsi engagé, quelle autre était inscrite pour l'amortissement. Tout cela était absent, égal à zéro. Allez calculer ensuite les bénéfices d'une entreprise ainsi gérée. Veut-on une autre révélation? On se figure que le monopole des tabacs date de loin, qu'il est une chose sacrée, créée après mûre ré flexion, à laquelle on ne saurait toucher sans une sorte d'impiété. La vérité est tout autre. Le monopole a été institué en 1824, à titre d'essai, pour cinq ans. Depuis, il a été tou jours renouvelé à titre temporaire, après exa.-; men, débat contradictoire, qui permettait d'en surveiller le fonctionnement et d'en dé noncer les abus. Quand et comment est-il de venu permanent? Par un des tours de passe passe où excelle le régime parlementaire. A la fin de 1892, le budget n'avaeit pas été voté à temps, il fallut recourir à des douzièmes provisoires. Justement la période décennale du monopole expirait à cette date. Dans l'im possibilité d'en discuter le renouvellement, on inséra au dernier moment, dans la loi sur les douzièmes, un article 23 qui prorogeait le monopole « jusqu'à ce qu'il en fût autre ment ordonné ». Il passa à mains levées, sans observation, pas un journal n'y fit même allusion. Nous en sommes restés là. L'his toire est jolie, mais d'un comique tout de même un peu attristant. - A. A.-P....