Extrait du journal

D'analyser sa vie et compter à la fois Ses espoirs d'aujourd'hui, ses bonheurs d'autrefois. Lui, le comprend aussi ce plaisir, et sur l'onde, Sa seconde patrie, il s'est construit un monde Où son cœur orphelin peut encor se blottir Dans ces deux bras tendus qu'on appelle avenir. Etre marin, n'avoir que repos éphémères, Ouvrir sa voile errante aux espoirs solitaires, A lous les vents du cœur se laisser emporter, Et, voir à l'horizon la tempête monter ; Le monde pour prison, l'Océan pour demeure, . S'en aller en changeant de rives à chaque heure, Désirer, espérer, prier sur son tombeau, C'est bien triste, bien doux, bien cruel et bien beau. Marin par goût, mais poète de naissance, rien n'é chappe à l'auteur des singularités de la vie maritime. Souvent, à huit cents lieues de tout rivage, quand le flot dort, que Je calme des nuits descend avec l'om bre sur le navire, qu'on est assis au pied du grand mât, on entend tout à coup sortir de la voile tran quille tous les bruits d'une grande cité, des chants, des cris, des murmures confus et, plus distinct, le son lointain des cloches : illusion qui est à l'oreille, sur les flots, ce que le mirage est à l'œil dans les sables brûlans du désert. Quoiqu'une bien riche description ait pour objet, dans le petit volume, d'expliquer ce phénomène nautique, la physique y trouvera, je crois, moins son compte que le goût des beaux vers. Ces pensées, du moins, occupent l'officier de quart, ou bien la veille ramène à son esprit des souvenirs, et sur ses lèvres des noms consolateurs. Plus tard si la nuit vient menaçante et ptus sombre, Si le mât affaibli se rompt, craquant c'aus l'ombre, Si toute voile manque au navire ébranlé, Si le vent souffle fort, si le cœur est troublé. Qu'à la mémoire un nom vienne doux et sublime : Pour le cœur éperdu c'est le nom qui ranime, . Pour l'horreur de la nuit c'est un dernier flambeau, Pour voile au mât brisé c'est un dernier lambeau. Faible ressource, trompeur espoir! la violence de l'ouragan redouble, et le marin, objet déjà d'un vif in térêt, disparaît avec le navire sous les flots. La plupart des attachantes pièces du volume sont de petits drames dont un esprit inventif fait sou vent, je crois, tous les frais, mais avec une viva cité, une fraîcheur, fine jeunesse qui révèlent l'ima gination ou trahissent l'âge de l'auteur. Nous au tres vieilles bonnes gens et tristes prosateurs (je prie de moi seul ), nous revenons sur le passé pour...