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L’Aube, 8 décembre 1944

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L’Aube
8 décembre 1944


Extrait du journal

— Regarde, maman, un soldat qui a du rouge aux lèvres... Et le petit garçon pointe son doigt vers un sous-lieutenant dont la bouche est en effet écarlate. Il faut évidemment savoir que notre armée possède des fem mes - soldats pour reconnaître une jeune fille en ce guerrier casqué dont la démarche est alourdie par la fatigue ; celle-ci a caché ses cheveux et troqué sa robe contre une culotte : son sou rire souligné de rouge est sa seule coquetterie. Assistante sociale d’un régiment de la 3e division d'infanterie algé rienne, qui groupe maintenant des hommes de toute l’Afrique du Nord, elle évolue sans embarras dans l’invraisemblable encombre ment de mulets, d’indigènes, de civils et de véhicules qui font de tout village nouvellement libéré une sorte de souk grouillant. Elle va, vient, semble connaître tous les combattants par leur nom et se souvenir de leurs soucis. A son passage, les Chleuhs, beaux et dé daigneux, sortent de leur rêverie pour lui sourire dans leur collier de barbe noire ; les spahis lui lancent un bonjour familier ; car les uns et les autres lui ont confié un secret, un chagrin ou une in quiétude : et, gentille confidente, elle a promis d’intervenir auprès des officiers au d’écrire à quelque Transplantés depuis des mois et parfois des années, beaucoup de ces hommes sont sans nouvelles de leur famille ; et les souffran ces de leur vie de soldat sont peut-être plus faciles à supporter qu’une inquiétude morale ou que le souvenir d’un être cher dont la photographie crasseuse traîne au fond de leur poche... Le service social aux armées, qui est en voie d’organisation, a donc une importance capitale ; et J’interroge la « sous-lieutenante » qui. sur un coin de mur, essaye de manger proprement avec un couteau sa ration de haricots. — Je ne connais guère que les projets qui concernent ma divi sion, répond-elle en souriant ; mais sans doute sont-ils les mê mes pour toute l'armée. Chaque régiment doit être doté de deux assistantes engagées pour la durée...

À propos

L’Aube est fondée en 1932 par Francisque Gay et Gaston Tessier. Ce journal d’opinion, d’obédience catholique et de gauche, a d’abord beaucoup de mal à rallier les catholiques démocrates du pays à cause de son positionnement pas vraiment clair entre socialisme et Église. Il arrive néanmoins à fidéliser un lectorat restreint. Pacifiste et favorable à la politique de Locarno, L’Aube fut souvent violemment attaquée par la droite catholique ainsi que par l’extrême droite, notamment L’Action française.

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