Extrait du journal

l’Angleterre sera représentée à La Haye, nous pouvons être assurés que les délé gués de la France ne diront que ce que le Cabinet de Londres voudra laisser dire. Les nouvellistes qui ont annoncé avant-hier que M. Bourgeois prendrait l’initiative d'amorcer la question de la limitation des armements, ont voulu rire. Moins encore que M. de Nélidoff, représentant de la Russie et président de la Conférence, à qui on a faussement prêté le même dessein, M. Bourgeois n’aura cette audace. „ Nous avons expliqué que devant le mauvais accueil fait par l'Autriche et l’Allemagne au projet annoncé par l’An gleterre de soulever ce grave problème, la diplomatie britannique y avait re noncé. Il faudrait pour qu’une autre puissance amie de la nation anglaise y songeât, qu’elle en fût priée par cette dernière. Rien de semblable ne s’est passé jusqu’ici, et il serait bien étonnant que le fait se produisît. En tout cas, il est à peu près certain qu’il ne pourrait s’agir que d’une décla ration platonique, qui ne serait pas dis cutée à fond et n’aurait d’autre but que de donner une satisfaction d’ainourpropre aux pays qui ont paru tant songer à faire résoudre l’insoluble problème et ne voudraient pas passer aux yeux du monde civilisé pour avoir entièrement renoncé à leur utopie intéressée. Le programme de la Conférence de demain est, sur ce point, en recul véri table sur celui du Congrès de 1899. La circulaire du tsar qui précéda la première réunion définissait nettement le but. : 1» Rechercher sans retard les moyens de mettre un terme à l’armement progressif des armements de terre et de mer..... 2° Préparer les voies à une discussion des questions se rapportant à la possibilité de prévenirles conflits armés par les moyens pacifiques dont peut disposer la diplomatie internationale. Puis elle précisait certains points sur lesquels il faudrait arriver à s’entendre immédiatement î entente pour la réduc tion effective des budgets de guerre et de marine, interdiction de l’emploi d’explosifs plus puissants que ceux en usagé actuellement, suppression des tor pilles et engins analogues, etc. L’Angleterre se promettaitd’aller bien plus loin cette fois-ci. Tous les ballons d’essai qu’elle a lancés ont crevé, et aucun programme n’a été formulé par personne. L’Europe doit d’ailleurs souhaiter que des sujets si brûlants ne soient pas traités à La Haye. De vives paroles pro noncées au Congrès de la Paix peuvent faire jaillir l'étincelle qui allumerait plus tôt qu’on ne l’attend la guerre iné vitable entre l’Allemagne et l’Angle terre, ou bien entre les Etats-Unis et le Japon. Si, reprenant l’ancien programme du tsar, la Conférence arrivait seulement à régler les droits des neutres en temps de guerre,la question delà contrebande de guerre, celle du droit de visite et quelques autres encore, elle aurait rendu d’appréciables services. Les Etats n’au raient pas à regretter les sacrifices qu’ils font pour payer un séjour de deux mois...