Extrait du journal

C'est moi le berceau.., le petit berceau... Suis-je assez joli.. ? assez doux.. ? assez tentant.. ? Regardez-moi avec mes couvertures blanches, et chaudes, et légères !.. avec nus clairs rideaux et mon ange d’ivoire.. ? Comme il va' être gentil, bébé, là-dedans, avec ses pieds minuscules, ses menottes si délicieusement sculptées... avec ses yeux d’un bleu de matin.., avec les petites fossettes de ses joues... tout ce petit être, fait d’elle, de lui, de Dieu qui a choisi son ftme encore obscure dans sa grande ré serve d'éternité... •Te suis le berceau... le petit berceau, joli partout. ' I.e dernier animal devient poélique quand approche l'heure dé me préparer. Avez-vous-jamais tenu, dans le creux de votre main le nid de tel pauvre petit oi seau.. ? Est-il assez finement tr'essé... doucement capitonné et.-décoré de mousson! Quand il sera fini, posé entre deux branches, ii se confondra tellement, avec l'arbre que les veux les plus fureteurs auront peine à le distinguer. F,t de petite êtres vont vivre en lui... Pendant des semaines et des semaines, lentement, la vie va prendre corps... un CÆvur». une tète... des yeux... des ailes... Et quand res ailes s'ouvriront dans l’es pace, le nid sera aussi net, aussi beau, aussi coquet que le jour où la vie y appa rut pour la première fois. Mystère des dis viuçs délicatesses !.. • C'est que Dieu est amour. Et, parce qu'il est amour, il veut la vio. Et il la veut d'une volonté profonde, con tinue, absolue. Il la veut avec une force qui, dans sa pensée, doit être irrésistible. Regardez autour de vous.. ? La vie.. ? mais elle est partout ! Elle est dans le champ fertile... elle est sur le tronc desséché de l’arbre... sur le rocher battu par les vagues... elle pousse entre les pierres du mur... Et le petit brin d'herbe, armé de pied en cap avec sa tige et sa graine, se fraye, vainquour. un passage même entré les pavés des villes, même au travers du ballast arrosé, jour et nuit, par le brasier des trépidantes locomotives ! # Or, contre celte volonté si affirmée de Dieu, tu te dresses, toi, chaque jour. Toi, qui as reçu l’existence, lu refuses de' la transmettre. Tu dis h la vie, c'est-A-dire à Dieu : « Tu n'iras pas plus loin !.. » Toi, père... toi. patriote... Toi, femme... loi, mère, dont l’enfant est la seule raison d’être... tu me regardes, moi, berceau joli, attendrissant... berceau qui appelle... qui implore, et tü dis : « Montez-le au grenier !.. » * — .Montez-le ou grenier !.. J’ai un enfant... deux enfants, je n’en veux plus avoir d’autres I. Quelquefois même, tu n’en veux pas avoir dii tout... Et, ô horreur que l'animal n’a jamais connue,' quand tu vas en avoir... tu les tués !.. Mais -tu n’as donc jamais examiné ta conscience.. ? Tu ne t'es donc jamais rendu compte du rôle que tu jouais.. ? . Homme; écoute, je vais te le dire ; Dieu n’a jamais créé un plaisir pour le plaisir. Tu fausses l'œuvre de Dieu. Il t’invitait à son geste auguste de créateur, et ,tu t’écroules'dans le mépris de toi-même. Toi, femme, tu pouvais être, la com pagne,. la. mère. Tu deviens... ce qu’ici je n'ose pas écrire. Et s’il no s'agissait que de loi, du do ton seul foyer ! Mais tu attires sur ton pays la colère de ce Dieu qui se réserve, ct. à Uii seul, le droit de limiter la vie. Tu voues le kaiser h l'exécration du monde, et lu as raison. Mais le kaiser n’est que la causé seconde. La cause première, c’est toi... toi qui as contribué à creuser ce vide dont la nature a horreur... vide dans lequel s’est ruée l'Allemagne, qui ne nous aurait jamais at taqués si nos berceaux avaient eu leur chiffre providentiel de petite Français,...