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Le Charivari, 21 avril 1851

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Le Charivari
21 avril 1851


Extrait du journal

On lit dans la République : La République a annoncé, vendredi dernier, que le journal le Charivari avait été saisi à raison d’une lithographie politique ayant pour titre : Le prix de l’adresse aux ChampsElysées. Il nous est impossible de dire comment cette sai sie a été accueillie à Paris et dans les départemens, mais nous pouvons certifier qu’elle a obtenu un suc cès de fou-rire parmi les détenus politiques de la Conciergerie. Le numéro du Charivari de ce jour-là nous fut apporté par un ami commun, qui ne comprenait pas plus que nous que le parquet eût pu voir dans cette naïve plaisanterie le motif d’une saisie. La lithogra phie alla de cellule en cellule, et à chaque station elle provoquait le rire le plus franc, le plus sincère, le plus bruyant qu’aient jamais entendu les murs d’une prison. Ce numéro nous fit passer, avouons-le, un mo ment fort agréable, et nous serions certainement un ingrat si nous ne nous empressions de le consta ter, aujourd’hui que nous sommes rendu à la li berté. Cet accueil, nous n’en doutons pas, est d’un bon augure pour notre spirituel confrère. On nous a dit (nous ignorons si le fait est vrai) que le commissaire chargé delà saisie avait été pris tout à coup, à la vue de ce dessin, d’un éclat de rire homérique, et qu’aut bout de quelques instans tout le monde riait, comme on riait dans l’Olympe après un joyeux festin. Nous ne savons pas s’il sera donné suite à cette affaire, et si la chambre des mises en accusation renverra devant les assises l’artiste et le gérant du journal. Il pourrait se faire, d’ailleurs, que les ma gistrats déclarassent innocente cette satire au crayon, et que les poursuites commencées fussent abandon nées. Mais si, contre notre attente, le Charivari se présente devant le jury, il peut compter sur un ac quittement. Les hommes qui font partie du jury de la Seine lisent le Charivari tous les matins ; ils savent aussi bien que nous qu’il existe une notable différence en tre les feuilles politiques sérieuses et les petits jour naux satiriques ; que ceux-ci ont le droit de tout dire, tandis que ceux-là doivent peser plusieurs fois leurs paroles, et que telle chose qui pourrait blesser celui à qui elle s’adresse sera tout de suite pardonnée, si elle est débitée d’une façon plaisante et dans un de ces recueils qui ont l’heureux privilège de continuer de nos jours la vieille tradition de la gaité gauloise. Eh! mon Dieu? dans le temps où nous vivons il ne faut point poursuivre ceux qui nous font rire : il y a tant de gens qui nous font pleurer !On rit, nous le savons, aux dépens et des uns et des autres. On a ri de nous hier, on rira de vous demain, et grâce au ciel nous espérons qu’on rira longtemps encore de tous ceux qui s’agitent et s’agiteront sur la scène politique. La caricature est française, ne la proscrivons pas ; c’est le sentiment populaire qui l’a créée, c’est ce...

À propos

Fondé par Charles Philipon en 1832, Le Charivari fut le premier quotidien satirique illustré au monde. Régulièrement poursuivi pour sa critique de Louis-Philippe, le journal disparaît néanmoins bien plus tard, en 1937.

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Données de classification
  • véron
  • malitourne
  • inde
  • france
  • olympe
  • paris
  • la seine
  • la république
  • conciergerie