Extrait du journal

La femme dont nous avons parlé semblait absorbée dans sa contemplation, lorsque tout à coup des pas qui bruirent derrière elle la firent se retourner brusquement— Giulio, c'est toi? dit-elle, en se précipitant dans les bras de l'hommequi venait d'arriver. —Oui, c'est moi, répondit-il, c'est moi, chérie ; je n'ai pu résister au désir de te voir. Je n'aurais pu dormir cette nuit, vois-tu; j'étais rongé de jalousie en pensant que tant d'autres, allaient s'enivrer de. ta voix et de ta vue, tandis que moi, je ne pouvais qu'en rêver. Je me suis glissé dans la foule, je t'ai cherchée partout, je t'ai trouvée, je suis heureux. — Mais c'est une imprudence, murmura la femme en se dégageant des bras qui l'enlaçaient, si on nous surprenait ! — Eh bien! qu'importe! Est-ce que je ne suis pas ton fiancé? Voyons, ne pourrais-tu leur dire à tous, en leur rendant raillerie pour raillerie : Je suis la femme du peintre Giulio Mancini, un bon peintre, messeigneurs, qui manie répée comme le pinceau.— Ah! tête folle! un peu de patience donc, encore un jour. —Un jour! ah! Ciolina (car c'était elle), Ciolina, vaniteuse que vous êtes, vous tenez plus à votre gloire qu'à votre amour. — Giulio, pourquoi me dire de ces choses-là? Donnez-moi ce jour encore, ce sera le dernier de mes jours de gloire, après je serai toute au bonheur. — Eh bien! après demain donc, nous partirons, n'est-ce pas? Nous serons à Rome dans trois jours, mariés dans quatre, et alors plus de gloire ni.de triomphes; vous ne serez plus Sômiramide la grande, vous serez Marietta l'adorée; vous serez toute à moi, belle reine, à moi seul. —A toi seul....