Extrait du journal

Ces derniers jour», dans un cimetière de cumpügne tout ensoleillé, parmi un grand concours d'amis, on célébrait les obsèques du l’écrivain Marcel Roul’f qui laisse une œuvre abondante et diverse où se montre la richesse d’un esprit singulièrement cu rieux et qui poussait loin ses curiosités... Et, pour obéir à sa volonté, on a lu devant la tombe quelques pages de la Pro fession île foi du vicaire savoyard. Voilà qui : arrive rarement pur le temps qui court. Il | est bon de reconnaître que Rousseau a ! encore ses fidèles. Ils ne sont peut-être pas , à proprement parler ses disciples. Ils rc- : jettent bien des choses de ses doctrines ou ils ne le suivent pas dans toutes ses aspi- J rations. Mais, dans certains de leurs élans, ! ils se rapprochent du ’ui Les idées religieuses de Rousseau, on les connaît. Four Rousseau, si l’on discute sur la matière, on est conduit forcément à affirmer l'existence d’un dieu, créateur du monde, d’une providence qui a placé { l'homme au centre des chose», qui nous a donné une âme spirituelle et la liberté, cl ; qui récompensera la vertu dans une autre vie. En fuit, le seul guide sûr. c’est la ; certitude intérieure, c’est la révélation lin- 1 médiate par le cœur. L’abbé Gaime avait , mené Jean-Jacques au lever du jour sur 1 une haute colline, et là, devant la splendeur du paysage, il lui avait dit : « Regarde, admire et crois ». Telle était la foi du vicaire savoyard. Le dieu de Rousseau cd un dieu « sensible au cœur ». Sans doute, le triomphe du mal dans m civilisation contemporaine est-il de nature à infliger aux hommes indécis quelque scepticisme. Mais chacun finit par obéir à son penchant profond Marcel Rouff fuyait le scepticisme et le pessimisme, bien qu’il regardât de près le niouvemeht médiocrement attrayant de notre petit globe. Il avait étudié les rnarii- ! festations caractéristiques de ce qu’on pourrait appeler la grande industrie au dix-huitième siècle. 11 avait donné tous ses soins d’érudit et d’idéaliste à l'histoire socialiste de la Révolution publiée sous la direction de Jaurès. Cela ne l'empêchait pas d’être poète, certes. Je dirais même que cela l’y aidait. Poète, il le fut. Il nous donna même un recueil de poèmes, bien éloignés d’être sans mérite. Il fut poète, comme il fut philosophe. Et l’on trouverait cette poésie comme cette philosophie, éparses et quasi...