Écho de presse

« Au fond d'une mine » à Saint-Étienne, avec Jules Vallès

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« Le mineur », affiche d'Eugène Carrière, 1900 - source : Gallica-BnF

En 1866, le futur auteur de L'Enfant visite pour le Le Figaro une mine de charbon à Saint-Étienne. Il y livre un aperçu saisissant des conditions de travail des mineurs du milieu du XIXe siècle.

Les 16 et 17 novembre 1866, Jules Vallès livre au Figaro un reportage en deux parties intitulé « Au fond d'une mine ». Le journaliste de 34 ans, qui n'est pas encore l'auteur de L'Enfant et de L'Insurgé mais a déjà signé dans le célèbre journal des articles remarqués, écrit cette « Lettre de province » depuis Saint-Étienne, ville où il passa son enfance.

 

Son reportage, d'un réalisme saisissant, est un témoignage exceptionnel sur la vie des mineurs en cette seconde moitié du XIXe siècle. Vallès, qui est alors l'un des premiers à s'intéresser à leur quotidien, raconte sans fard la pénibilité de ces existences soumises à un danger constant.

 

Dans la première partie de son texte, publiée le 16 novembre, il commence par raconter les préparatifs de son expédition, à laquelle il participe avec un de ses amis et sous la conduite d'un ingénieur.

« AU FOND D’UNE MINE

(Première heure.) [...]

 

L’ingénieur en chef lui-même ne nous avait point caché que les accidents, dans les mines, sont fort nombreux. “Sur quinze cents mineurs, avait-il dit, quelques précautions qu’on prenne, et l’on en prend d’immenses, nous avons bien par an vingt morts et six cents blessés.”

 

J’avais appris, avec une certaine tristesse, que depuis quelques semaines le mutilé seul avait donné : la statistique voulait son mort. C’est nous, peut-être, qui allions faire le jeu dans ce whist lugubre. Je me prenais à aimer la vie ! »

Puis, c'est la descente au fond du puits :

« Je sens le sol manquer sous nos pieds ; nous descendons doucement, sans bruit, comme des pendus. Autour de nous, l’eau suinte et chante, il semble que nous n’arriverons jamais. J’ose plonger l’œil au fond : je me relève manquant d’air, ayant froid au crâne. Je ne tiens pas non plus à voir le ciel : heureusement il est caché ; la cage est coiffée de fer, tant mieux. Il me semble que ce petit rond bleu m’aurait fait peur !

 

“C’est pour protéger contre la chute des pierres, dis-je à l’ingénieur en montrant la coiffe.

– Quand une pierre tombe, me répond-il, rien ne l’arrête. Pas plus tard que le mois dernier, il y a eu dans une mine deux hommes tués par des coins de roches qui se sont détachés comme fera b...

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