Écho de presse

Été 1936 : "pour la première fois, les ouvriers en vacances"

le 29/05/2018 par Marina Bellot
le 20/06/2016 par Marina Bellot - modifié le 29/05/2018
Départ en vacances, gare Saint-Lazare ; Agence de presse Mondial Photo-Presse ; 1932

En 1937, malgré la météo capricieuse, l'été est la promesse de "cette merveilleuse évasion" que sont les vacances. Et le mot a cette année-là une saveur particulière.

La météo a beau ne pas toujours être au rendez-vous les premiers jours de l'été, les années qui suivent l'adoption de la loi sur les congés payés de 1936 sont empreintes d'une joie particulière.

Dans Le Journal du 29 juin 1937, on peut lire :

"Et l'O. N. M. (l'office national météorologique), en nous faisant espérer, pour les premières heures du proche avenir, un adoucissement de la température — en dépit de quelques averses dans le nord-est de la France — confirmait toutes les dispositions allègres de ceux qui, dédaigneux des complications de la politique ou des affaires, ne veulent voir dans la saison qui vient qu'un prétexte à cette trêve bénie, à cette merveilleuse évasion vers la lumière, les libres horizons, l'air vivifiant, la passagère insouciance, la joie : les vacances !"

"Vacances" : pour une majorité de Français, le mot n'est devenu réalité qu'un an auparavant, grâce aux lois votées par le Front populaire.

Pour la première fois, les ouvriers goûtent à ces joies nouvelles. Paris-Soir en juillet 1936 y consacre un reportage dans le Nord de la France :

"A la sortie de l'usine, ils faisaient plaisir à voir.

Tout le monde a assisté à une sortie d'usine. Que ce soit à Roubaix, à Paris, à Lyon ou à Marseille, le tableau ne varie que dans les détails. Les jeunes gens passent les premiers enfourchent leur vélo et pèsent sur les pédales pour s'éloigner au plus vite de l'atelier où huit heures d'affilée ils ont durement peiné. Les hommes les suivent, puis viennent les femmes qui portent le cabas. Les dactylos, les manutentionnaires, fraîchement repoudrées, leur emboîtent le pas. Les vieux ferment la marche sans hâte. Ils gagnent la rue tout en roulant des cigarettes avec des gestes rituels.

Oui, c'est un spectacle toujours semblable à lui-même et l'on a le droit de dire qu'il n'engendre point, à l'ordinaire, de la gaieté. C'est pour cela qu'hier, à une heure de l'après-midi lorsque les sirènes hurlèrent pour annoncer dans chaque usine de textile la fin du travail de la première équipe, la soudaine et joyeuse animation qui s'empara de la ville m'enchanta.

Un peu partout, les vastes porches lâchaient sur le pavé de la foule anonyme et bruyante. Tous paraissaient d'agréable humeur. Certains sifflaient, d'autres souriaient aux anges.

Pour la première fois, les ouvriers du textile partaient en vacances."