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Journal des débats politiques et littéraires, 5 septembre 1844

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Journal des débats politiques et littéraires
5 septembre 1844


Extrait du journal

Nous admirons le National, qui persiste à nous accu ser d'une énorme indiscrétion pour avoir dit que la France n'entendait, dans aucun cas, faire au Maroc une guerre de conquête. Notez bien que le National, lui, se chargeait dans le même moment de déclarer à l'Angleterre qu'il n'y avait plus pour elle à reculer, et que l'occupation de Mogador l'obligeait à tirer l'épée contre la France. Ce n'est pas seulement avec le Maroc que la partie est engagée , disait le National, c'est avec l'Angleterre. Le cas de guerre est arrivé. Mais le Na tional ne devait pas en rester là. La guerre avec l'An gleterre , c'est trop peu de chose ; ce serait trop tôt fini. Nous ne voulons pas plaisanter sur tous ces plans de débarquement et d'invasion en Angleterre qui rem plissent depuis quelques jours le National et certaines autres feuilles; le sérieux des circonstances nous en empêche. Les uns demandent trois mois, les autres n'en demandent que la moitié pour conquérir les trois royaumes de la Reine Yictoria. C'est en vérité le pendant des trop fameuses lettres du Times. Nous le disons avec douleur, la presse , des deux côtés du dé troit, ne se fait pas beaucoup d'honneur par cet assaut d'injures et de fanfaronnades. Il n'y a certainement pas un homme sérieux en Angleterre qui ne croie à la bra voure de nos marins, et pas un homme sensé en France qui se figure qu'une guerre avec l'Angleterre fût une chose si facile et si prompte à terminer. Le National, ajoutions-nous, va déjà plus loin. Ce n'est plus seulement avec l'Angleterre que le cas de guerre est arrivé, c'est avec le continent tout entier ; le National n'hésite pas à révéler le secret de son plan de campagne qui consisterait à prendre les peuples pour auxiliaires contre les gouvernemens et contre les Rois. Voilà donc l'Allemagne avertie ! Voilà tous les gouver nemens mis en demeure de songer à leur sûreté ! Peut être croyaient-ils à notre modération ! Peut-être les im pressions de 1840 s'étaient-elles effacées de leur esprit ! Peut-être même, dans le différend momentané qui vient de s'élever si malheureusement entre la France et l'Angleterre, étaient-ils disposés à nous donner raison ! Le National ne craint pas d'évoquer et de réveiller tous les vieux souvenirs de la Convention. Nous doutons, quant à nous, qu'ils soient plus agréables aux peuples qu'aux Rois. A commencer par la France, c'est une singulière façon de l'encourager à la guerre que de lui présenter les funèbres images de 1793 et de 1794. On ne porte pas le feu de la révolution chez les autres sans l'avoir d'abord allumé dans son sein ! Respectons nos pères ; plaignons-les des terribles extrémités où ils ont été réduits ; jetons un voile sur leurs fautes et sur leurs erreurs ; ce n'est pas à nous à mous faire leurs accusa teurs , à nous qui avons recueilli l'héritage qu'ils nous ont conquis par leur sang ! N'oublions pas cependant les tristes leçons qui font partie de cet héritage. Est-ce que la Convention n'a pas enfanté le Directoire ? Est-ce que le Directoire n'a pas enfanté la dictature militaire et l'Empire ? Est-ce que toutes ces républiques, nées sous l'épée de la France, ne se sont pas , avec la même facilité, transformées en royaumes pour les frères ou pour les capitaines d'un conquérant ? Est-ce que les peuples qui avaient salué avec transport notre révolu tion , si pure à son origine , n'ont pas fini par réunir leurs armes contre la France? Tout se tient et s'en chaîne dans cette terrible histoire. Rien n'est donc plus imprudent, c'est nous qui avons le droit de le dire , que ces provocations insensées à la, guerre, que ces menaces et ces défis jetés à des gouver-1 nemens qui ne nous menacent pas , que ces appels ré- j volutionnaires adressés à des peuples auxquels l'expé-...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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