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Le Constitutionnel, 5 juillet 1833

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Le Constitutionnel
5 juillet 1833


Extrait du journal

flanc de laquelle est pratiquée la grande route, nous apercevions les dômes des clochers et les toits élevés de cette jolie cilé, nos yeux se promenaient à gauche sur une vaste étendue d'eau que sillonnaient quelques navires, en face s'allongeait la presqu'île d'Antibes; à droite , des campagnes par semées d'oliviers et d'orangers, et le lit tortueux et sec d'une rivière qu'alimentent les pluies et la l'onte des neiges pendant l'hiver. C'était çn novembre, et la chaleur était tout au plus suppoitable, la végétation con servait encore la pleine vigueur dont en Provence jouissent les arbres vers la fin de l'été, et à voir la verdure qui décorait les coteaux et les prairies , on eût cru être encoie dans les mois de juin ou de juillet; et pourtant derrière nous s'élevaient de hautes montagnes , barrières entre la France et l'Italie, couronnées d'une épaisse couche de neige, et qui for maient par leur blancheur et leur grise stérilité un contraste admirable avec la richesse des campagnes qu'elles dominaient. C'est à ces montagnes que l'on doit la température si douce de cette partie du Piémont, parce que, placées tout-à-fait au nord, elles abritent le pays contre les vents qui soufflent dans cette direction, et que les rayons du soleil qui dardent sur leurs flancs nus et -dépouillés, se réfléchissent sans cesse sur les plaines situées au-dessous, et entretiennent même pendant l'hiver une chaleur assez forte pour faire croître les oliviers et les orangers en pleine terre. La nouvelle route . pratiquée sous Napoléon , monte en se repliant sur elle-même jusqu'au sommet d'une montagne assez élevée : nous étions ar rivés à la fin de cette côte après trois heures de marche. Un village appelé la Turbie, composé d'une chapelle et de quelques fermes, est le lieu de repos pour les voyageurs, et sert dé limité au Piémont et à la principauté de Mo naco. Quelques gardes douaniers nous invitèrent là à défaire nos malles, et nous demandèrent poliment si elles ne contenaient rien qui fût de con trebande. «Rien absolument, répondîmes-nous.—C'est extraordinaire, ré pliqua l'un d'eux, qu'à son schako élevé en forme de cloche, et à quelques galons crasseux incrustés dans les manches de son habit," je reconnus pour le chef de la bande ; c'est extraordinaire que vous n'ayez point de livres ou de journaux.—C'est donc de la contrebande ? — Sans doute , encore plus que le tabac et les étoffes. » Et il se mit à fouiller avec une avidilé d'aigle qui fond sur sa proie, et visita jusqu'aux derniers coins de ma malle ; j'y avais glissé sans intention une petite brochure intitulée • l'Art d'aimer d'Ovide. Il la saisit promptement , elir.e demanda ce que c'était. «Uii li vre de classe, lui répondis-je ; ne voyez-vous pas 1e titre? — C'est vrai, répondit-il ; je n'avais pas remarqué le nom de l'auteur. » Et ce soldat ' pape se retira sans trouver rien de plus mauvais. Je déplorai avec compagnons de voyage le sort des habitans d'un pays régi par de lois, et après avoir pris quelques raffraîchissemens , nous nous mîi route, maudissant le cliff de la douane, qui nous avait fait perdre u) considérable pour la visite de nos malles. Nous entrions dans la principauté de Monaco. Je rappelai à m®,coi pagnons l'ancienne féodalité de la France , époque à laquelle exismen$\\ tant de seigneuries sous la domination d'infâmes despotes qui exerçaient^', , lyur autorité sur leurs vassaux de la manière la plus atroce. Le sol que ,; nous foulions était une véritable seigneurie; le prince de Monaco y exerce sui- ses sujets un système de despotisme à peu près semblable aux seigneurs...

À propos

Le Constitutionnel fut un quotidien politique sur quatre pages, fondé par Fouché et une quinzaine d’actionnaires, pour la plupart contributeurs du journal. D’abord bonapartiste, il s’agissait d’un organe puissant jusqu’à la naissance du Second Empire, rassemblant bonapartistes, libéraux et anticléricaux. Marqué par la personnalité d’Adolphe Thiers, le journal rendait compte des informations diplomatiques européennes, mais discutait également de l’actualité politique française.

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