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Le Figaro, 17 octobre 1910

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Le Figaro
17 octobre 1910


Extrait du journal

Immobiles, souriants, confortablement ins tallés dans leurs stands de l'Exposition de la locomotion aérienne, dont Frantz-Reichel a décrit hier la brillante inauguration, les avia teurs regardent la foule qui les environne et concourt pour le record de la lenteur dans le Circuit du Grand Palais. Chacun son tour... C'est la foule du dimanche, croyante et affec tueuse. Elle ne se lasse pas de reconnaître, sous leurs chapeaux de soie les hommes, mas qués" qui s'envolaient au-dessus d'elle; elle se résigne difficilement à s'éloigner des appareils qu'elle approche enfin de prés : elle désire les caresser, les flatter de la main, pour qu'ils frissonnent, tournent leur hélice, s'envolent. Mais il faut céder aux courants terriens, pas ser du. monoplan au biplan et devant les Gar gantua pneumatiques. Il y a également des remous, comme dans le ciel. Ces remous vous jettent au rez-dechaussée du Grand Palais. On reprend son souffle, on se retourne avant de repartir, et c'est alors qu'on . découvre dans un coin un aéroplane nouveau, un ballon inconnu, de conception, de forme si bizarre qu'on s'ap proche immédiatement. « Oh ! que c'est drôle! » disent les femmes. Mais soudain, elles se mordent les lèvres et rougissent, car l'inventeur apparaît lentement derrière son appareil. Il a cinquante ans : les cheveux sont gris, la bouche est triste, les épaules sont basses, les mains sont tremblantes. Seuls, les yeux sont clairs, en eau d'Evian, et reflètent la source intérieure d'énergie qui soutient le corps brisé sous la pauvre jaquette éraillée. L'inventeur^ ne s'est levé tout d'abord que pour défendre son travail, dans un mouvement "de chien à l'attache. Il ne veut pas qu'on se moque. On ne rit pas et des soldats du génie examinent curieusement les devis épinglés sur le tapis d'une table. Un monsieur interroge : C'est...? l'inventeur se lève aussitôt. D'une voix usée, il explique : « Avec cette hélice vous vous élevez, avec celle-ci vous vous soutenez, avec celle-ci vous descendez... et alors j'ai là un gouvernail, ... et puis, ce dispositif breveté pour tourner sans déplacer mon centre de gravité, etc., etc. Pendant qu'il parle, en promenant un doigt peureux sur chaque pièce, comme un domp teur sur la tête de Bes fauves, on l'examine et on le reconnaît, le petit Jean-Gabriel Borkmann, de l'aviation. Ët voici sa femme, contre la barrière. Elle nous regarde avec une anxiété fiévreuse. Elle joint les mains à faire craquer ses mitaines. Elle voudrait crier : « Croyez-le, croyez-le », tandis que son mari conclut avec une moue rageuse et triste : « Voilà 1 .J'ai...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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