Extrait du journal

Oui, mais on allait avoir à traverser un moment difficile : les élections. Les rivalités allaient se produire; les partis seraient aux prises; la polémique s'exaspérerait. Et qu'est-ce qui serait le plus en danger? la liberté de la presse. Car, au fond, pourquoi M. Dufaure voulait-il une loi de plus contre les journaux? par tendresse pour les journaux. Sa vraie crainte était « qu'en beaucoup d'endroits la presse périodique ne tombât dans des excès qui auraient infailliblement pour résultat de discréditer, dans l'esprit des hommes les plus libéraux, l'usage légitime de la libre discussion ». Vous voyez, c'était pour que la presse ne discréditât pas l'usage légitime de la libre discussion dans l'esprit des hommes les plus libéraux, c'était pour préserver la presse périodique de ses propres excès, c'était par sollicitude pour le droit d'écrire, que le garde des sceaux ajoutait à tant de lois terribles qui menacent le droit d'écrire une loi plus terrible encore que toutes les autres. C'était par amour pour la liberté de la presse que le garde des sceaux infligeait à la liberté de la presse une loi qui combinait ingénieusement la cour d'assises, la police correctionnelle et l'état de siège. Qui aime bien châtie bien. Et penser que les journaux ont si mauvais cœur qu'ils n'ont pas remercié M. Dufaure de la loi qu'il leur assénait sur le crâne !...