Extrait du journal

A notre accusation formelle d’in curie et de j’menfichisme, M. Lépine répond, dans le Temps, par une note explicative qui, naturellement, ne donne aucune explication. Jugez-en vous-mêmes : Nous n’avons pas à intervenir dans ces réunions privées où l’on entre sur invita tion. On y est chez soi. Nous fournissons des gardiens de la paix pour assurer la circulation des voitures; nous ne pouvons faire davantage. Aucun préfet de police n’a jamais fait ni pu faire davantage. ' ; Si nous devions nous mêler de ces sortes de réunions, nous serions obligés d’inter venir aussi dans les soirées mondaines, où l’ou est nombreux et où, si les cris : « Au ■ feu! » retentissaient, on périrait étouffé, comme rue Jean-Goujon ; npus devrions aussi réglementer la sortie et l’entrée des grands magasins, où les visiteurs se près- ■ sent eu grand nombre les uns contre les autres, et où une catastrophe analogue à. celle d’hier ne manquerait pas, si un in cendié se déclarait, de se produire; Cela n’est pas possible. C'est toujours la même chose : le préfet de police se croit tous les droits; il .en use et surtout il en abuse. En revanche, il se déclare affranchi de tous les devoirs. Il en voie ses agents envahir, à cinq heures du matin, des domiciles on ne peut plus privés, sous le fallacieux prétexte que les domiciliés peuvent employer des allumettes de contre bande. Il forcé des femmes mariées à sa montrer en chemise aux mouchards de la préfecture et des jeunes filles à déguerpir à moitié nues de leurs lits virginaux. A ces turpitudes illé gales il se proclame parfaitement autorisé. Par contre, quand un ba raquement notoirement insalubre et, sous tous les rapports, périlleux pour la foule qui s’y entasse, appelle un minutieux examen, il s’en dispense par ce motif que, bien que tout ache teur jouisse de la faculté d’entrer dans une vente et de se présenter à un comptoir, la réunion y est privée l A ce compte-là, le public ne péné trant dans une salle de spectacle que s’il montre au contrôleur son billet, qui lui sert de carte’ d’invitation, un théâtre est un domicile tout aussi privé que l’était le baraquement de la rue Jean-Goujon. Est-ce que l’exhibition du cinéma tographe n’en faisait pas, d’ailleurs, une scène à propos de laquelle il était - nécessaire de prendre les mêmes pré cautions qu’à l'Olympia et autres éta blissements où la cinématographie fait partie de la représentation ?. Le galant Lépine craignait-il de blesser là susceptibilité des aristocra tiques vendeuses en faisant surveiller leur sommaire et dangereuse instal lation par deux pompiers armés de leurs lances, ~ comme dans tous les théâtres de Paris? Un simple jet d’eau, au début de l’incendie, eût suffi pour éteindre les flammes du rideau qui avait pris feu. Or, on devait d’au tant plus prévoir un événement'dé ce genre que la toiture de la salle de vente consistait eu une simple toile goudronnée qu’une allumette tombant tout ardente d’une fenêtre eût fait immédiatement flamber. Ce subit respect du mur de la vie...