Extrait du journal

En amont de Paris, la Seine, la Marne, l’Yerrc et l’Orge, à force de croître et do s’épandre, ont confondu leurs cours ; des milliers d’hectares de cette banlieue si vivante et peuplée ne forment plus qu’un lac immense dont les eaux mornes sous le ciel d'hiver, réfléchissent çà et là des toits, les cheminées d’usine, les têtes des arbres. Les courants tumultueux de la Seine et de lu Marne dévalant vers Paris troublent seuls celte immobilité sinistre et la, marche du neuve se dessine par les épaves dont ie troupeau se précipite en désordre. De Paris â Corbell. * Hier, toutes les lignes de l’Orléans étant coupées, le P.-L.-M. s’obstinait à maintenir encore les communications de Paris à Melun. Les ingénieurs de la compagnie, dirigeant tout un peuple d’ouvriers, travail laient à sauver les voies environnées d’eau. Poussée par la brise, la double lagune avait commencé de ronger les bords du remblai qui s'écroulait petit à petit par pans de cinquante mètres. Les poteaux télégraphiques baignaient déjà isolés à trois mètres du bord et l’on avait dû parer à l'effondrement des passerelles de manœu vre qui enjambent la voie en élevant des sous des tours carrées faites de traverses do rails. Les trains qui se hasardent jusqu’à Corheil routent dans Veau, à petite allure, passé Villeneuve-Saint-Georges. En deçà, la voie domine de quarante centimètres la montée persévérante des deux lacs, entre lesquels elle s'allonge comme une interminable pres qu'île dont les berges s’effritent peu à peu. Quatre mille s»acs de ciments ont été jetés tels quels, tout le long d’Alfortville à Vil leneuve-Triage, mais les progrès de l’eau, du côté de la Seine, ont raison peu à peu de ce hofitionnage. Aussi s’occupe-t-on avec une prodigieuse activité à poser une voie de renfort du côté de la Marne. Elle était pres que terminée dans la soirée, tandis que l’eau s’emparait du bord opposé, faisant fléchir les premiers rails. La lenteur et la rareté des trains permet tent de tolérer, te long du ballast couvert de neige, l’exode des malheureux qui, leurs enfants dans des châles et leurs femmes chargés de lamentables bagages, s'achemi nent désespérément vers la capitale. Al fort coupé de Paris. Les trains qui circulent encore sont bon dés par l'émigration qui devient générale. Si la ressource de la voie ferrée venait à faire défaut, on se demande avec angoisse oo que deviendraient les sinistrés de toute la nanlieue amont. Les routes, en effet, sont coupées les unes après les autres ; la Seine et la Marne, qui auront achevé bien tôt leur concentration se rejoignent déjà au pont de Charenton, noyant tout Alfortville et Maisous-AIfort et tendant à les séparer définitivement de Parie. Depuis hier aprèsmidi, l’eau couvrait la route, nationale, talonnant les piétons affolés, les voitures et les troupeaux. Quant à la route de Melun, si elle n’est pas coupée à l’heure présente,...