Extrait du journal

Et, d'abord, il faut se rendre compte de la situation des membres de l'illustre Compagnie, des droits dont ils jouissent, des devoirs qui en sont la contre-partie. Ils s'engagent à la servir pendant vingt ans au moins. Vous pensez bien qu'il y a des raisons sérieuses pour qu'une telle obligation, leur soit imposée. L'acteur profite du rayonnement de la Comédie, du prestige qu'elle confère; c'est sur ses planches qu'il se forma, qu'il conquit la renommée; il contribua, d'ailleurs, à l'enrichir en lui consacrant ses forces, en lui apportant l'éclat de son talent, mais aussi elle lui procura des avantages exceptionnels. A-t-il moins reçu qu'il n'a donné ? La question ne se pose point. Tant que l'artiste est jeune, ardent, vigoureux, il donne plus qu'il ne reçoit; quand il est fatigué, affaibli, il reçoit plus qu'il ne donne. C'est une des grâces, une des noblesses de cette antique constitution républicaine du Théâtre-Français que chacun y travaille pour tous et tous pour chacun. Les sociétaires font de la mutualité, sans le savoir ou le vouloir, comme M. Jourdain faisait de la prose. Les chaînes qui les empêchent de quitter la Maison sont la...